Aberu Mekuria défendra son titre au marathon d’Ottawa Banque Scotia

par Paul Gains

Il y a un an, Aberu Mekuria arrivait à Ottawa sans tambour ni trompette et presque sans pression, sous-estimée de ses compatriotes éthiopiens plus connus. Contre toute attente, elle a couru vers la victoire et raflé 30 000 $ dans cette course « Label d’or » de l’IAAF.

Le scénario sera différent le 29 mai prochain quand la femme de 32 ans défendra son titre au marathon d’Ottawa Banque Scotia, puisqu’elle sera une favorite très respectée dans une course de calibre international.

Mais il ne faut pas croire pour autant que Mekuria croulera sous la pression. Après tout, elle a remporté d’importants marathons à Hengshui (Chine), à Eindhoven et à Cologne avant celui d’Ottawa. Avec une bonne dose de confiance, elle a annoncé récemment le principal objectif qu’elle s’était fixé pour son retour dans la capitale canadienne.

« Je vise un temps inférieur à 2 h 25 min. Je veux assurément abaisser ma marque, confie-t-elle. Mon objectif cette année pour le marathon d’Ottawa est d’offrir une bonne performance, meilleure que jamais, et de gagner la course de nouveau. »

« Mon entraînement se passe bien et je me concentre sur mon programme quotidien et hebdomadaire puisque je veux donner tout ce que j’ai. Je suis très heureuse de ma vitesse et je crois que les choses se présentent bien. Je m’entraîne avec mes amis d’Ikaika Sports (sa société de gestion). Nous avons un très bon esprit d’équipe et échangeons sur nos expériences. »

Le record personnel de Mekuria est toujours de 2 h 25 min 30 s, un chrono qu’elle a enregistré en enjambant la ligne d’arrivée près de l’hôtel de ville d’Ottawa. Et elle se rappelle avec émotion sa plus grande victoire : alors qu’il ne lui restait que cinq cents mètres à franchir, elle a dépassé Rebecca Chesir, du Kenya, et a pris une avance de onze secondes. Une grande favorite, Meselech Melkamu (record personnel de 2 h 21 min 1 s), est arrivée cinquième.

Aberu Mekuria Zennebe competes at the 2015 Ottawa Marathon. Credit: PhotoRun

« J’ai trouvé relativement facile de gagner le marathon d’Ottawa l’an dernier puisque j’étais bien préparée et j’avais beaucoup travaillé pendant plusieurs mois avant la course », se souvient-elle.

« Il y a bien eu des hauts et des bas pendant le marathon d’Ottawa, mais c’était évidemment une course fantastique pour moi et j’en suis bien contente. »

Cependant, le temps froid et venteux l’a peut-être empêchée de battre le record de 2 h 24 min 31 s établi en 2014 par sa compatriote éthiopienne Tigist Tufa.

Comme c’est le cas de nombreux excellents coureurs éthiopiens, Mekuria est née à Bekoji, la ville célébrée dans le documentaire Une ville dans la course (Town of Runners). Cette ville se trouve à environ 220 km au sud-est d’Addis. Les sœurs Dibaba, Derartu Tulu – championne olympique au 10 000 m des Jeux de 1992 – et Kenenisa Bekele – trois fois championne olympique –, viennent toutes de Bekoji.

« J’ai déménagé à Addis Abada en juillet 2009 pour poursuivre mon entraînement et me concentrer sur ma carrière d’athlète, explique Mekuria. C’est mon club, l’Oromia Police Sport Club, qui m’a encouragé à venir à Addis Abada. »

La plupart des coureurs d’élite éthiopiens s’entraînent très tôt; ils se rassemblent en milieu rural avant le lever du soleil. Pour être prêts à l’entraînement, les coureurs doivent parfois se lever à 4 h du matin.

Après l’entraînement, Mekuria rentre à la maison pour se reposer jusqu’à la prochaine séance. Son engagement envers sa carrière en athlétisme est manifeste. Elle va souvent à l’église le dimanche et parfois l’après-midi. Pour se reposer du dur labeur que représente l’entraînement, elle aime aussi prendre un repas entre amis.

Récemment, l’Éthiopie, tout comme de nombreux pays, est devenue la cible de critiques en raison d’une poignée de cas de dopage. Il est clair que Mekuria déteste la position dans laquelle les tricheurs ont placé les athlètes éthiopiens.

« Ça me désole et ça me choque de savoir que certains de mes rivaux utilisaient des drogues interdites, répond-elle. L’image des athlètes éthiopiens et le développement de notre sport en sont grandement atteints. »

Mekuria sait que la fin de sa carrière de coureuse approche, mais elle ne sait pas encore ce qu’elle fera à la retraite. Dans un pays où le revenu annuel par habitant est d’environ 650 $, les coureurs sont parmi les mieux nantis. D’autres athlètes de Bekoji ont utilisé l’argent gagné lors des courses pour démarrer une entreprise. Par exemple, Bekele, Tulu et Tirunesh Dibaba ont fait construire des hôtels.

« À part la course, je n’ai pas encore de projets, révèle-t-elle, mais je rêve d’investir dans diverses entreprises comme les autres athlètes éthiopiens connus. Bref, je ne sais pas encore quand je prendrai ma retraite. Tant que je suis capable de courir, je veux continuer à le faire. »

Une victoire au marathon d’Ottawa Banque Scotia 2016 lui assurerait certainement une retraite plus confortable et un avenir heureux.