Être asthmatique et courir… durant la pandémie de COVID-19
Par Tracy Shouldice, membre de l’Escouade active Otto’s Ottawa
Bonjour coureurs et camarades! Un bon ami m’a suggéré de rédiger un article sur les personnes asthmatiques qui pratiquent la course à pied. Comme nous traversons cette période de COVID, que les asthmatiques y sont particulièrement vulnérables et que le printemps est aussi la saison des courses, j’ai pensé que le moment était bien choisi de le faire.
Je suis asthmatique. Et je suis aussi un coureur. Je dirais même, un coureur assez compétitif. Je me classe habituellement parmi les 10 % à 12 % des meilleurs coureurs. Dans certaines courses, je me suis classé parmi les trois premiers de mon groupe d’âge, un résultat dont je suis très content.
D’une certaine manière, j’ai de la chance. La plupart du temps, mon asthme (diagnostiqué lorsque j’avais cinq ans) est déclenché par des facteurs environnementaux : fourrure, particules, plumes, poussière, moisissures et pollens – les ingrédients habituels. Donc, si j’essaie de fournir un effort physique par une journée très froide (et il y en a beaucoup à Ottawa), je peux devenir très essoufflé, jusqu’à ce que je me serve de mon inhalateur de secours.
Ainsi, l’asthme nuit à ma capacité à courir, même en l’absence d’allergènes. Cet effet se produit en raison de ma capacité pulmonaire réduite. Mes poumons ne peuvent tout simplement pas absorber la même quantité d’air et d’oxygène que des poumons normaux et sains. J’ai obtenu des résultats médiocres à presque tous les tests pulmonaires que j’ai passés dans ma vie. Mes pauvres poumons ne tiennent pas le coup. J’ai appris à vivre avec cette réalité (je vous en dirai davantage sur la manière de gérer l’asthme plus tard).
Si vous n’êtes pas asthmatique, imaginez que vous vous bouchez le nez et que vous tenez une petite paille dans votre bouche. Et qu’ensuite vous faites votre course. Vous ne pouvez pas enlever la paille, et vous ne pouvez pas déboucher votre nez. Cette paille est tout ce que vous avez. C’est la meilleure description que je puisse trouver pour expliquer ce que signifie être asthmatique et pratiquer la course à pied.
Je ne peux pas vous dire combien de fois, après une course, un secouriste s’est approché de moi pour me demander, « Monsieur, vous allez bien? » parce qu’il pensait que j’étais sur le point d’avoir un gros malaise. Surtout lors des courses de 5 km ou 10 km, où on court à pleine vitesse tout le long. Je peux à peine respirer quand j’ai fini, et même parler est difficile. Je fais simplement un signe de la main aux secouristes bien intentionnés, je n’ai jamais eu besoin de leurs services, heureusement – mais je suis content de savoir qu’ils sont tout près et qu’ils sont attentifs.
Après mes séances d’entraînement par intervalles, les gens remarquent parfois que je respire anormalement fort. Pendant assez longtemps après la fin de l’entraînement.
Cependant, je prends plusieurs mesures pour atténuer ou prévenir les effets indésirables :
- Je m’échauffe avant une course ou une séance d’entraînement par intervalles, afin de ne pas partir « à froid ». Cette stratégie permet de réduire considérablement les efforts que le cœur et les poumons doivent fournir, surtout sur les deux ou trois premiers kilomètres.
- Les jours de grand froid, je m’assure de sortir quelques minutes avant de courir – et je démarre assez doucement, pour ne pas surmener mon corps.
- J’apporte mon Ventolin (inhalateur de secours) si je sais que je vais courir intensément ou s’il fait plus froid que d’habitude.
- Si je ne me sens pas « en pleine forme » d’un point de vue cardio-pulmonaire avant une course, je fais une introspection objective : « est-ce que ÇA [course d’entraînement, course pour le plaisir ou séance d’entraînement par intervalles] mérite que j’y laisse ma peau? » Parfois, il est préférable de profiter du voyage plutôt que de se soucier de la destination.
- Je porte un bracelet RoadID afin que, si pour une raison quelconque je m’effondre, la personne qui me trouve sache qui contacter. Il indique que je suis asthmatique. Bien qu’il n’ait jamais servi, ce modeste investissement est bien utile pour la tranquillité d’esprit qu’il nous apporte, à moi et à ma famille, lorsque je pars courir seul.
- Je ne porte jamais, JAMAIS, le dossard de quelqu’un d’autre lors d’une course. Pourquoi? Si je m’évanouis et que je porte le dossard de quelqu’un d’autre, la situation peut devenir grave. VRAIMENT grave.
- Et finalement, je prends toutes les mesures préventives que je peux, comme utiliser un inhalateur préventif à base de stéroïdes tous les jours et prendre des antihistaminiques lorsque les facteurs environnementaux aggravent mon état. C’est la vie quand on est asthmatique.
Cette année, j’ai eu une autre surprise : la COVID m’a rendu visite le 23 mars, quatre jours seulement avant la course Around the Bay 30k – une course pour laquelle je me suis inscrit en 2020, et qui a été reportée plusieurs fois depuis. Quel revirement de situation! Je vais donc devoir attendre une année de plus pour croiser la Faucheuse.
Un aspect auquel je n’étais pas préparé est la longue période de récupération de la COVID. Selon cet article de la CBC, je ne suis pas le seul coureur dans cette situation. Même les coureurs actifs et en bonne santé ont de la difficulté à remonter la pente, tout comme moi. Je suis maintenant à 22 jours du jour zéro. Je tousse encore un peu, et je suis souvent congestionné et fatigué. Ai-je mentionné que je m’entraîne pour le Marathon international d’Ottawa Tartan, qui aura lieu le 29 mai? La COVID a un peu bouleversé mon entraînement. Au cours des dernières semaines, je devais courir de 50 à 60 km par semaine. J’ai couru ZÉRO kilomètre au cours des 10 premiers jours de la COVID, et depuis, je n’ai fait qu’environ la moitié de l’entraînement recommandé.
Alors, que peut faire un coureur asthmatique? Comme le dit l’article de la CBC, changez vos attentes. Écoutez votre corps. Allez-y, mais essayez un exercice facile au début. Peut-être une course ou une marche lente (et je dis bien LENTE) de 1 km ou 2 km. Si ça fonctionne, essayez ensuite un 7 km tranquille. Puis, essayez un rythme un peu plus soutenu, mais seulement sur quelques kilomètres pour commencer, car vous augmentez les efforts. Il faut voir à long terme et être conscient du travail que font les poumons et le cœur. Autrement, le prix à payer n’en vaut tout simplement pas la peine.
Je suis heureux de dire que j’ai effectué une bonne séance d’entraînement par intervalles récemment et je sens que je suis sur le point de pouvoir reprendre mon programme d’entraînement. Mais si cette histoire de COVID persiste et que je ne peux pas m’entraîner suffisamment d’ici le 29 mai pour obtenir les résultats que je voulais au marathon (moins de 4:00), je ne vais pas m’en faire. Je vais plutôt changer mes attentes. Je vais décider consciemment, dans le corral de départ, de profiter du voyage plutôt que de me soucier de la destination. Je donnerai la main à des enfants, je remercierai les personnes qui ont préparé des panneaux originaux, je saluerai la foule et je ferai des accolades à mes amis que je verrai en chemin. Il se peut même que je passe en marchant à quelques postes d’eau. Si c’est le pire résultat que je peux espérer, ça me va.
Tracy est un ancien membre de l’Équipe Formidable de 2019, un membre de Courez Ottawa depuis 2010, et il a participé à chaque édition de la Fin de semaine des courses depuis. Cette année, il fera son cinquième marathon (quatrième à Ottawa). Tracy court pour sensibiliser la population à des causes importantes et amasser des fonds pour ces causes. Depuis 2017, il appuie la Fondation pour la santé mentale Le Royal. Lorsqu’il ne court pas, Tracy aime manger des glucides avec un bon café (plus il est corsé, meilleur il est) ou une bière froide (encore une fois, plus elle est forte, meilleure elle est). Il joue aussi de la batterie et du piano pour le plaisir. Il a hâte de fouler le bitume avec tous les autres participants de la Fin de semaine des courses Tamarack d’Ottawa de 2022! Vous pouvez lire d’autres articles du blogue de Tracy ici.